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Le moment est venu pour une alliance climatique de l'Atlantique Sud

Compte tenu de leur leadership régional et de leur implication dans le G20 et la COP30, un partenariat entre le Brésil et l’Afrique du Sud pourrait renforcer les liens Sud-Sud.

Le dialogue sur le climat en Afrique évolue. On ne parle plus seulement des événements météorologiques extrêmes, mais de plus en plus d’une transition vers une économie à faible émission de carbone et ses implications.

Dans les forums et en particulier à la Conférence des Nations unies sur le changement climatique de 2023 (COP28), il a été reconnu que les émissions en Afrique étaient marginales et qu’elles représentaient moins de 4 % du total mondial. Malgré cela, le continent doit répondre à des besoins énergétiques considérables pour garantir un accès abordable à l’énergie, conformément à l’objectif de développement durable n° 7 de l’ONU et l’Agenda 2063 de l’Afrique.

Jusqu’à présent, les partenariats internationaux sur le climat entre pays africains et pays développés ont surtout favorisé des transitions énergétiques vers des sources d’énergie durable. C’est le cas en particulier des partenariats pour une transition énergétique juste (JETP), comme avec l’Afrique du Sud et le Sénégal. La même approche a été adoptée avec les pays asiatiques, avec comme principales caractéristiques des accords de prêts à taux d’intérêt réduits pour soutenir le développement d’infrastructures d’énergie renouvelable.

Alors que les partenariats pour une transition énergétique juste jouent un rôle moteur, il est opportun d’explorer les partenariats Sud-Sud sur le climat. Plusieurs pays en développement progressent rapidement dans leurs initiatives de développement résilientes face au changement climatique. En forte concurrence avec l’Inde, la Chine domine déjà 80 % de la fabrication mondiale des panneaux solaires et pourrait devenir le principal producteur de véhicules électriques.

Les liens entre le Brésil et l’Afrique du Sud pourraient rapprocher l’Afrique et l’Amérique latine

Le Brésil excelle dans les énergies renouvelables qui fournissent 40 % de son électricité. Il est à la tête des biocarburants au niveau mondial, la plupart des garages de ses grands centres urbains disposant d’éthanol. Les États du Golfe investissent également massivement dans les énergies renouvelables.

L’idée d’un club climatique des BRICS fait son chemin, avec plusieurs de ses membres qui investiraient de manière substantielle dans une transition juste. Elle souligne la capacité du Sud mondial à agir collectivement dans le changement climatique.

Le projet d’un partenariat Sud-Sud sur le climat a été favorablement accueilli lors des ateliers sur le changement climatique organisés en avril par l’Institut sud-africain des affaires internationales et l’Institut brésilien de recherche économique appliquée. Ces ateliers s’inscrivaient dans le cadre de la série Think20 organisée pour soutenir la présidence brésilienne du G20 de cette année.

Le moment est venu pour le Sud de s’unir autour des questions climatiques. En 2022, le G20 s’est mis d’accord sur une présidence du Sud pendant quatre années consécutives, qui a débuté par l’Indonésie en 2022, suivie par l’Inde en 2023. Ce sera le tour du Brésil en 2024 et de l’Afrique du Sud l’année prochaine.

Il est temps de concrétiser les partenariats Sud-Sud sur le climat

La présidence brésilienne fait du changement climatique l’une des priorités du G20 cette année, priorité que l’Afrique du Sud prévoit de maintenir en 2025. Le financement de la lutte contre le changement climatique et une transition énergétique juste sont des enjeux majeurs pour le sommet du G20 et la réunion des ministres des Finances. Le sommet de cette année précédera la COP30 qui sera accueillie par le Brésil en 2025.

Dans un monde divisé et sur la voie difficile de la multipolarité, les institutions multilatérales traditionnelles ne bénéficient pas d’un soutien global. La guerre d’Israël à Gaza et la guerre en Ukraine ont semé la discorde. Dans le rapport 2024 de la Körber Stiftung sur les puissances moyennes émergentes, 38 % des personnes interrogées en Inde, au Brésil et en Afrique du Sud considèrent que le G20 est en mesure de résoudre les problèmes mondiaux, contre seulement 18 % pour l’ONU.

Pour ces grandes économies émergentes, le G20 est important. L’Union africaine en sera membre à part entière pour la première fois cette année. L’Afrique a déjà exprimé son ambition climatique lors du premier sommet africain sur le climat 2023. Elle est la première région à avoir fait une évaluation des risques de sécurité climatique à l’échelle du continent.

L’Afrique du Sud et le Brésil sont des partenaires privilégiés en matière de climat et de développement durable. Ils ont organisé plusieurs sommets de la Commission des Nations unies sur le développement durable, en 1992 et 2012 à Rio et en 2002 à Johannesburg. Ils font partie des 17 pays très diversifiés dont les priorités sont la biodiversité, la conservation et le développement durable. Ils sont tous deux à la tête de la lutte contre le changement climatique dans leur région et sont profondément investis dans une transition énergétique juste pour soutenir leurs développements.

Les pays en développement ont une capacité limitée à déterminer un rythme de transition raisonnable

Des relations plus étroites seront également mutuellement bénéfiques. Le président Lula da Silva a exprimé le désir de consolider le partenariat entre le Brésil et l’Afrique, basé sur des liens historiques solides et sur sa volonté de jouer un rôle actif dans la croissance et le développement du continent et de bénéficier de l’augmentation de la production et de la consommation africaines.

Ce renforcement des relations entre le Brésil et l’Afrique du Sud pourrait de plus faciliter un rapprochement entre l’Afrique et l’Amérique latine, favorisant ainsi une croissance mutuelle et un développement à faible émission de carbone.

Malgré l’importance des partenariats pour une transition énergétique juste, les pays en développement doivent faire face à des défis tels que la vitesse de la transition, la possibilité d’immobiliser les actifs des combustibles fossiles et la nécessité d’investir massivement et simultanément dans l’adaptation au climat. Les pays en développement doivent également affronter les catastrophes liées au climat, qu’elles soient aiguës (comme les conditions météorologiques extrêmes) ou à plus long terme (augmentation des températures et élévation du niveau de la mer).

Les partenariats énergétiques actuels laissent une marge de manœuvre limitée aux pays en développement pour fixer un rythme de transition raisonnable, en raison des pressions exercées par les nouvelles barrières commerciales et les marchés mondiaux fondés sur le carbone. La nécessité de décoloniser la transition devient impérative.

Les pays en développement devraient approfondir leurs alliances Sud-Sud, au-delà du partage d’expériences sur une transition énergétique juste. Les nouveaux accords doivent s’étendre à l’ensemble de la chaîne de valeur de la réponse au changement climatique, avec pour objectifs communs la réduction des dommages climatiques et l’accélération du développement des pays du Sud.

Un partenariat climatique entre le Brésil et l’Afrique du Sud, renforcé en partie par leurs mandats successifs au sein du G20, pourrait marquer un tournant significatif.

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